Etude de l’adaptation basée sur les écosystèmes au Pays de la Meije

Synthèse du projet de recherche participatif "MountainPaths" - par Enora Bruley et Sandra Lavorel

Face aux changements globaux et leurs effets déjà perceptibles, l’adaptation représente un enjeu fondamental pour nos sociétés afin de maintenir leur qualité de vie, qui dépend en grande partie des bénéfices retirés de la nature. Pour atteindre le double objectif de préserver la qualité de vie et les écosystèmes dont elle dépend, il est urgent de réorienter les activités humaines vers des trajectoires de développement plus durable.

Dans ce contexte, le projet MountainPaths avait pour objectif :

► de comprendre comment les écosystèmes peuvent être mobilisés par les habitants d’un territoire pour s’adapter aux changements climatiques et socio-économiques à venir ;

► d’explorer avec les acteurs locaux une trajectoire d’adaptation désirée pour 2040 en identifiant les conditions naturelles et sociales nécessaires à sa mise en œuvre.

Site d’étude : le Pays de la Meije, Hautes-Alpes (05)

Les territoires de montagne sont considérés comme les sentinelles du changement climatique et en subissent déjà de nombreuses conséquences. Suite à la crise du Chambon, il a semblé pertinent de lancer une réflexion sur l’avenir de ce territoire. Une démarche renforcée par les connexions déjà bien établies entre les chercheurs et les acteurs.

Porté par une équipe de recherche pluridisciplinaire Franco-Suisse (LECA et ETH Zurich), le projet MountainPaths s’est déroulé sur quatre années (2017 et 2021) dans le prolongement de nombreux projets réalisés par le LECA sur les prairies, notamment en lien avec les agriculteurs. Il a été financé par les Agences nationales de Recherche Française et Suisse ainsi que l’Université Grenoble Alpes. Ce projet de recherche participatif visait la co-production de connaissances et a rassemblé 92 acteurs locaux et régionaux issus de différents secteurs socio-économiques.

© Parc National des Ecrins - Pascal Saulay


Une trajectoire désirée et partagée pour le Pays de la Meije, fruit d’un travail collectif, a pu être obtenue. Toutefois, elle n’a pas vocation à représenter l’ensemble des points de vue des acteurs du Pays de la Meije. De cette trajectoire, découlent quatre groupes d’objectifs d’adaptation basée sur les écosystèmes qui seraient fortement interconnectés dans leur mise en œuvre :

La valorisation des atouts naturels et culturels : développement du tourisme scientifique, de l’éducation aux spécificités locales, de l’artisanat et de l’art mais aussi de la préservation du paysage et des écosystèmes ;

La diversification de l’agriculture : développement de l’agro-tourisme et diversification des productions agricoles dans les limites bioclimatiques mais aussi maintien des activités d’élevage et pastorale ;

La diversification des activités en montagne : adaptation des pratiques au changement climatique, tourisme doux avec peu d’infrastructures, diversification des pratiques hivernales et maintien de l’identité "hors-piste" ;

L’exploitation de nouvelles ressources : développement d’un système d’irrigation pour l’agriculture afin d’assurer la production d’énergie verte et l’amélioration de la consommation.

► Synthèse complète du projet disponible ici

► Contacts : Sandra Lavorel et Enora Bruley

► Pour aller plus loin : thèse d’Enora Bruley "Les populations travaillent avec la nature pour co-produire l’adaptation aux changements globaux dans les Alpes Françaises"

► Projet connexe en cours lié à la ZAA et au Pays de la Meije : VIVALP

© Parc National des Ecrins - Bernard Nicollet


En termes de résultats, plusieurs éléments peuvent être mis en avant

Sur le plan de la qualité de vie dans le Pays de la Meije, les trois dimensions apparues durant le travail avec les acteurs locaux sont les suivantes :

► Maintien de la ruralité en lien avec les activités agricoles, principalement d’élevage ;

► Attractivité du paysage en lien avec les activités touristiques de nature ;

► Maintien de la vie locale en lien avec l’habitabilité et l’attachement au territoire.

Une qualité de vie future qui dépend de la multifonctionnalité du paysage et des activités humaines

Au Pays de la Meije, comme dans de nombreux territoires ruraux et touristiques, il existe de forts liens de dépendance entre les différentes activités. Les changements et adaptations induits au sein de certaines d’entre elles peuvent avoir des effets en cascade sur les autres. Ceci souligne l’importance d’une collaboration entre les acteurs de différents secteurs économiques dans l’objectif de maintenir cette multifonctionnalité. Par ailleurs, dans un contexte de changements forts, les sentiers de dépendances peuvent se transformer en pièges dont il sera difficile pour un territoire de sortir. Un des enjeux de l’adaptation est alors d’identifier ces dépendances en avance et d’engager les changements nécessaires afin de maintenir les options ouvertes pour les acteurs du territoire.

Créer les conditions nécessaires pour l’adaptation : quels leviers pour agir en faveur d’une adaptation basée sur les écosystèmes durable et désirée ?

Afin de préserver la qualité de vie et les écosystèmes dans les territoires de montagne, les principaux leviers finalement identifiés sont les suivants :

► Favoriser la capacité d’adaptation des écosystèmes et la multifonctionnalité

► Dépasser les sentiers de dépendances

► Favoriser les collaborations entre acteurs et secteurs

► Soutenir et favoriser l’innovation sociale

► Renforcer les capacités d’action de l’ensemble des acteurs

► Changer les systèmes de gouvernance et de valeurs dominants.

Mis à jour le 15 juillet 2024